Les procédures pour licencier un salarié en fonction de la cause et du statut de l’employé

Les procédures pour licencier un salarié en fonction de la cause et du statut de l'employé

Les arcanes des diverses procédures pour licencier un salarié ne laissent aucune place à l’improvisation. Afin de protéger les droits de chacune des parties au contrat de travail, la loi a prévu différentes configurations pour répondre à chaque situation. Décoder les procédures de licenciement en fonction du motif et du statut du salarié.

Mettre un terme à une collaboration professionnelle n’est pas seulement un moment difficile pour chacune des parties ; c’est également, pour l’employeur, une situation dans laquelle il engage sa responsabilité en cas de non-respect de l’une quelconque des étapes du licenciement. En effet, un manquement à la procédure de licenciement donne lieu au versement d’indemnités prud’homales, parfois assorti d’une obligation de réintégration.

Aussi, l’employeur doit-il prendre le temps de la réflexion avant d’engager une telle procédure, dont les effets peuvent se ressentir dans toute l’entreprise. Le temps de la réflexion et du conseil est donc un préalable indispensable avant toute décision de licenciement.

Le licenciement peut intervenir pour des motifs tenant à une faute, à une inaptitude, à des circonstances non fautives ou pour des raisons économiques. Tous les salariés sont concernés, du collaborateur en CDD au salarié en CDI.

1. Les divers motifs de licenciement

La décision de licencier un salarié doit se fonder sur l’une des raisons suivantes, à peine d’engager la responsabilité de l’employeur devant le Conseil des Prud’hommes, et parfois devant les juridictions pénales.

Aussi, l’employeur souhaitant mettre un terme à un contrat de travail doit être certain de pouvoir démontrer l’existence de la cause du licenciement, sachant qu’en cas de litige, le Conseils des Prud’hommes dispose d’un pouvoir souverain d’appréciation.

· La force majeure : le licenciement pour raison économique

L’employeur peut recourir à une procédure de licenciement collectif ou individuel lorsqu’une situation économique conduit à la cessation définitive de son activité, en cas de difficultés économiques s’échelonnant sur plusieurs trimestres, en cas de mutation technologique majeure, ou encore dans le cadre d’une restructuration.

Quelle que soit la raison économique, celle-ci doit satisfaire 3 conditions cumulatives : l’événement doit être « imprévisible » ; il ne doit pas trouver sa source au sein de l’entreprise – « extérieur » – ; il n’existe aucune alternative pour l’employeur – « irrésistible ».

· La faute simple

Une faute simple peut prendre la forme d’une erreur, d’une négligence dépourvue d’intention de nuire de la part du salarié. Une telle faute donne le plus souvent lieu à une procédure disciplinaire plutôt qu’à un licenciement.

Néanmoins, si l’employeur choisit de mettre un terme au contrat de travail pour ce motif, le salarié est tenu de travailler durant la durée de son préavis, sauf à en être dispensé par l’employeur.

· La faute grave

Il s’agit d’un ou de plusieurs faits/comportements violant les obligations découlant du contrat de travail ; il peut s’agir d’une alcoolisation sur le lieu de travail, d’un abandon de poste, d’une absence injustifiée, du refus d’accomplir une tâche relevant des attributions du salarié, etc…

· La faute lourde

Cette faute est d’une telle gravité qu’elle justifie une rupture immédiate du contrat de travail. Il en va ainsi de la destruction ou de la dégradation du matériel de travail, de l’exercice de violence physique ou morale au sein de l’entreprise, ou encore de la divulgation d’informations confidentielles.

Cette faute lourde dispense l’employeur de certaines obligations au regard de la procédure de licenciement. Par ailleurs, tant la faute grave que la faute lourde dispensent l’employeur du versement de l’indemnité de licenciement et de l’indemnité compensatrice de préavis. Seule reste due l’indemnité compensatrice de congés payés, dès lors que les conditions en sont satisfaites.

· L’inaptitude

Constatant qu’une maladie ou qu’un handicap ne permet plus au salarié d’effectuer les tâches qui lui ont été confiées, l’employeur peut engager une procédure de licenciement pour inaptitude, à la condition expresse que cette dernière ait été constatée par la médecine du travail à l’occasion de deux visites médicales. Toutefois, en cas d’urgence, une seule visite suffit pour justifier la procédure.

Une fois l’inaptitude constatée officiellement, l’employeur peut licencier la personne dans l’une des trois situations suivantes : après avoir démontré que ses démarches pour reclasser le salarié sur un autre poste ont été vaines ; que le salarié a refusé la proposition de reclassement ; si l’avis du médecin du travail indique expressément que le « maintien du salarié dans l’emploi serait gravement préjudiciable à sa santé » ou bien que « l’état de santé fait obstacle à tout reclassement dans un emploi ».

· Le comportement non fautif ne permettant pas le maintien de la collaboration

L’employeur peut également mettre fin à une collaboration professionnelle pour des motifs non fautifs du salarié. La cause doit toutefois être « réelle » et « sérieuse » et appréciée comme telle par le Conseil des Prud’hommes. Il peut s’agir de l’insuffisance de résultat, du refus d’une modification du contrat de travail ou encore de profonds désaccords ayant donné lieu à des sérieuses difficultés de fonctionnement dans l’entreprise.

2. Les variations des procédures de licenciement en fonction de la cause

Quel que soit le motif du licenciement, l’employeur doit rapporter la preuve que la cause dont il se prévaut est à la fois « réelle » et « sérieuse ». Aussi, veillez à vous procurer tous les éléments qui permettront de convaincre le Conseil des Prud’hommes de l’existence de ces deux conditions. En effet, cette juridiction prud’homale apprécie souverainement le caractère « sérieux » du motif de licenciement.

Toute procédure de licenciement se compose de quatre étapes, auxquelles s’ajoutent parfois des particularités en fonction du motif de licenciement et de la qualité du salarié licencié.

Les quatre étapes incontournables d’une procédure de licenciement sont les suivantes :

· La convocation à un entretien préalable

L’employeur doit convoquer le salarié à un entretien préalable au moyen d’une lettre recommandée avec accusé de réception, ou bien remise en main propre. Si vous choisissez cette dernière solution, veillez à obtenir un récépissé signé par le salarié.

Le contenu de la convocation est très réglementé ; doivent y être mentionnés la raison de l’entretien, la date, le lieu et l’heure. Cette convocation doit également rappeler au salarié son droit à l’assistance d’une personne de son choix appartenant à l’un des organes représentatifs de l’entreprise ; si aucun n’existe, une liste de conseillers pour les salariés doit être jointe à la convocation.

5 jours ouvrés doivent séparer la remise de la convocation de la date de l’entretien. Par ailleurs, en cas de licenciement pour faute simple, la cause de licenciement doit être intervenue dans les deux mois, au plus tard, précédant la remise de la convocation. Des faits plus anciens ne peuvent pas être utilisés pour justifier un licenciement. Dans le cas du licenciement pour faute grave ou lourde, cette période de prescription est plus courte ; aussi, l’employeur doit-il agir avec davantage de célérité.

· L’entretien préalable

Il ne s’agit pas d’une formalité destinée à avaliser une décision ayant déjà été prise. L’entretien doit permettre au salarié de s’expliquer sur les faits reprochés. Par ailleurs, il ne peut pas se tenir si la personne choisie par le salarié pour l’assister n’est pas présente.

· La lettre de licenciement

Afin de donner à l’employeur le temps de la réflexion, la lettre de licenciement ne peut être envoyée immédiatement ; au moins deux jours doivent s’être écoulés entre la date de l’entretien et la date d’envoi de la lettre.

Il n’existe pas de délai maximum dans lequel la lettre de licenciement doit être envoyée au salarié, sauf en cas de licenciement pour faute simple, grave ou lourde ; la lettre doit alors parvenir au salarié dans un délai maximum d’un mois à compter de l’entretien préalable.

Cette lettre doit clairement indiquer la raison du licenciement. Quant aux motivations de la décision, elles peuvent être sollicitées par le salarié dans les 15 jours qui suivent la remise de sa lettre de licenciement. L’employeur dispose alors d’un délai identique pour répondre ; à défaut de réponse, l’absence de motivation ouvre droit au versement d’une indemnité supplémentaire d’un montant ne pouvant dépasser un mois de salaire.

En cas de licenciement pour faute lourde, l’employeur doit démontrer l’intention de nuire du salarié. Cette contrainte supplémentaire s’explique par la privation totale d’indemnité pour le salarié et par l’absence de délai de préavis.

· Le délai de préavis

Le salarié est tenu de travailler pendant 1 ou 2 mois avant de quitter l’entreprise en fonction de son ancienneté. Ce délai est porté à 6 mois voire plus, pour les cadres et les cadres supérieurs. En règle générale, l’employeur dispense le salarié de cette période et lui verse le salaire qu’il aurait dû percevoir durant ce délai.

Toutefois, en cas de licenciement pour faute lourde ou grave, ainsi que pour le licenciement pour inaptitude, il n’existe pas de période de préavis : la relation contractuelle se termine au jour de la réception de la lettre de licenciement.

3. Les spécificités de la procédure de licenciement en fonction du statut du salarié

· Licencier un salarié en CDD

Le salarié employé en CDD n’étant, par définition, employé que pour une durée limitée, l’article L1243-1 du Code du travail n’autorise son licenciement qu’en cas de faute grave, de force majeure ou en raison d’une inaptitude physique.

Néanmoins, lorsque le contrat en CDD a été conclu avec un cadre ou un ingénieur, son licenciement peut intervenir pour un motif réel et sérieux à l’expiration d’une période de 18 mois après la conclusion du contrat, ou bien « à sa date d’anniversaire ».

· Licencier un salarié de + 55 ans

Le licenciement d’un salarié âgé de 55 ans et plus doit faire l’objet d’une attention particulière. En effet, de nombreux d’employeurs ont été condamnés par les Conseils des Prud’hommes et les tribunaux correctionnels pour avoir terminé un contrat de travail sur le seul motif de l’âge d’un collaborateur.

Pour cette raison, les salariés + 55 ans bénéficient d’une protection légale plus importante que les autres employés non « protégés ». Ainsi, aux termes de l’article L1233-5 du Code du travail, en cas de licenciement collectif pour motif économique, l’employeur doit établir l’ordre des licenciements en veillant à ne pas défavoriser les salariés en raison de leurs âges.

· Licencier un salarié « protégé » en raison d’un mandat électif

Certains salariés bénéficient d’une protection spécifique en raison d’un mandat électif détenu dans l’entreprise ; il s’agit des délégués syndicaux, des délégués du personnel, des membres du comité d’entreprise ou du comité économique et social.

Avant d’engager une procédure de licenciement à leur encontre, l’employeur doit obtenir l’autorisation préalable de l’inspection du travail. La décision de l’inspecteur du travail est susceptible d’appel devant le tribunal administratif.

A cette première protection, s’ajoute l’obligation de consulter le comité d’entreprise après la tenue de l’entretien préalable. Le comité rend un avis simple qui ne lie aucunement le chef d’entreprise…dans les textes. En revanche, le maintien de la paix sociale au sein de l’entreprise peut en décider autrement.

Il est important de noter que ces protections sont étendues aux salariés ayant demandé la tenue d’une élection ainsi qu’à ceux ayant fait acte de candidature aux élections. Enfin, toutes ces mesures de protection s’appliquent durant la durée du mandat du salarié et/ou pendant une durée de 6 mois à 1 an après la fin du mandat ou de l’élection.

Une attention toute particulière doit être portée au respect de ces mesures. En effet, le non-respect de ces protections expose l’employeur à des sanctions pécuniaires prononcées par le Conseil des Prud’hommes, ainsi qu’à des peines de prison et des amendes prononcées par le tribunal correctionnel.

· En cas de maladie ou de grossesse

Les femmes enceintes et les salariés souffrant de maladies disposent d’une protection « ajustée » contre le licenciement en raison de leur situation personnelle. Ainsi, en dehors de la faute grave ou de l’impossibilité de maintenir le contrat de contrat pour une raison autre que la raison médicale, l’employeur ne peut pas licencier ces personnes durant le temps de la suspension de leur contrat de travail.

· Licencier un salarié pour « inaptitude »

Le licenciement d’un salarié pour « inaptitude » à accomplir une tâche comporte des spécificités qui engagent la responsabilité de l’employeur. Ainsi, en plus des mentions spéciales susmentionnées devant figurer dans la lettre de licenciement, l’employeur doit s’assurer que le salarié a bénéficié de deux visites médicales par le médecin du travail, sauf situation d’urgence.

L’avis de non-aptitude délivré par le médecin du travail doit faire partie des pièces de la procédure, ainsi qu’un état des recherches infructueuses de reclassement du salarié ou son refus du reclassement.

Pour en savoir plus sur les licenciements et les indemnités

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De Frédéric Carteron