Licenciement après 55 ans : ce que l’employeur doit savoir
Licencier un sénior comporte un risque de discrimination liée à l’âge. Devant un conseil de prud’hommes, l’employeur doit prouver le bien-fondé de sa décision. Revenons sur le cadre légal du licenciement après 55 ans.
En 2019, 60,2 % des 55 ans et plus étaient au chômage depuis au moins un an[1]. Le législateur, conscient des difficultés de retour à l’emploi des séniors, a prévu des dispositions particulières pour ce public, notamment en matière de licenciement après 55 ans.
Licenciement après 55 ans : risque de discrimination liée à l’âge
L’âge comptant parmi les critères de discrimination, il ne constitue pas un motif réel et sérieux de licenciement.
L’article L1132-1 du Code du travail l’indique clairement : « Aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, telle que définie à l’article 1 de la loi n°2008-496 du 27 mai 2008. »
Le licenciement d’un sénior de plus de 55 ans en raison de son âge est donc illégal. L’employeur doit savoir ce à quoi il s’expose si la discrimination est avérée :
- Réintégration du salarié ;
- Versement d’indemnités de fin de contrat (indemnités de licenciement, indemnités compensatrices de préavis et de congés payés s’il y a droit) ;
- Versement d’une indemnité supplémentaire pour réparer le préjudice subi — son montant ne peut être inférieur aux salaires des six derniers mois ;
- Condamnation pénale : trois ans d’emprisonnement et 45 000 € d’amende (article 225-2 du Code pénal).
De plus, toute stipulation dans le contrat de travail, une convention collective ou un accord collectif prévoyant une rupture de plein droit du contrat d’un salarié en raison de son âge, ou parce qu’il serait en droit de bénéficier d’une pension vieillesse, est nulle (article L1237-4 du Code du travail).
Licenciement après 55 ans et indemnité légale majorée
Le mode de calcul de l’indemnisation a été revu en 2017 (décret n°2017-1398 sur la revalorisation de l’indemnité légale de licenciement). Un licenciement à partir de 55 ans donne droit à 36 mois d’indemnisation, contre 30 mois pour les 53/54 ans et 24 mois pour les 50/52 ans.
L’indemnité légale est majorée de 25% pour les salariés de plus de 50 ans au moment de leur licenciement économique, mais cette majoration s’applique uniquement à partir de dix ans d’ancienneté.
Certaines conventions collectives prévoient également une majoration. Dans la métallurgie par exemple, elle est de 30% pour les salariés âgés de 55 à 60 ans (20% pour les 50/55 ans).
Licenciement après 55 ans : focus sur deux cas de figure
1. Le licenciement économique aménagé
La loi fixe des règles particulières concernant les salariés de plus de 50 ans :
- L’employeur doit établir l’ordre des licenciements à partir de critères qui rendent la réinsertion professionnelle particulièrement difficile — l’âge en fait partie (article L1233-5 du Code du travail).
- Dans le cadre d’un PSE (plan de sauvegarde de l’emploi), ces salariés sont parmi les premiers bénéficiaires de mesures telles que des actions de reclassement ou de formation, de réduction ou d’aménagement du temps de travail (articles L1233-61 et L1233-62 du Code du travail).
2. Le licenciement après 55 ans pour inaptitude
L’employeur qui juge un salarié inapte à effectuer les tâches qui lui incombent peut envisager son renvoi pour inaptitude. La décision relève cependant du médecin du travail.
Ce licenciement ne peut être associé au handicap ou à la maladie, au risque d’être discriminatoire. Mais un handicap ou une maladie peut être en cause.
Selon l’article L1133-3 du Code du travail, « les différences de traitement fondées sur l’inaptitude constatée par le médecin du travail en raison de l’état de santé ou du handicap ne constituent pas une discrimination lorsqu’elles sont objectives, nécessaires et appropriées ».
Depuis la Loi Travail de 2017, le licenciement pour inaptitude repose sur trois motifs :
- Impossibilité de reclassement du salarié ;
- Refus du poste proposé ;
- Ajout de mentions médicales particulières dans l’avis d’inaptitude : « tout maintien du salarié dans l’emploi serait gravement préjudiciable à sa santé » ou « l’état de santé fait obstacle à tout reclassement dans un emploi ».
L’employeur doit suivre une procédure spécifique :
- Examen médical par le médecin du travail lors de deux visites médicales ;
- Avis d’inaptitude délivré par le médecin du travail ;
- Recherche de reclassement du salarié dans l’entreprise, sauf mentions médicales particulières explicitement inscrites dans l’avis d’inaptitude.
En cas d’impossibilité de reclassement ou de refus du salarié de la solution proposée, l’employeur doit entamer la procédure de licenciement pour inaptitude. Le contrat est rompu à la date de notification du licenciement, sans préavis à effectuer.
À noter : à compter de l’examen médical de reprise, l’employeur a un mois pour prononcer le licenciement ou le reclassement du salarié déclaré inapte. Si ce délai n’est pas respecté, il doit lui verser un salaire correspondant à celui de son ancien poste.
Les textes de loi en vigueur en 2022 relatifs au licenciement pour inaptitude :
- Reconnaissance de l’inaptitude : Code du travail : articles L4624-10 à L4624-21 et articles R4624-42 à R4624-44;
- Obligation de reclassement, rupture de contrat : Code du travail : articles L1226-2 à L1226-4-3;
- Contestation de l’avis d’inaptitude : Code du travail : articles R4624-45 à R4624-45-2.