Réussir le recrutement d’un travailleur en handicap psychique
Entre la santé mentale des salariés français qui se fragilise et la libération de la parole autour des pathologies mentales, vous serez sans doute amené à croiser la route d’un candidat atteint d’un handicap psychique. Si c’était le cas, découvrez comment gérer sereinement le recrutement d’un travailleur handicapé.
Qu’est ce qu’un handicap psychique ?
Avant tout, il est important de rappeler qu’un handicap psychique n’a rien à voir avec un handicap mental qui est lié à un déficit intellectuel. En revanche, « un handicap psychique se définit par l’atteinte d’une pathologie mentale entraînant des troubles mentaux, affectifs et émotionnels, soit une perturbation dans la personnalité, sans pour autant avoir des conséquences sur les fonctions intellectuelles » explique Handicap.fr.
Le handicap psychique fait aussi partie des handicaps invisibles, ce qui est le cas de 80% des handicaps : ils ne sont pas facilement détectables et peuvent parfois entraîner des situations délicates.
Pour rappel, voici une liste non exhaustive de handicap invisible :
- les phobies
- les dépressions
- les maladies génétiques
- les maladies cardio-vasculaires
- les handicaps mentaux
- les handicaps psychiques
- les maladies invalidantes (asthme, allergies, diabète…)
- les troubles musculo-squelettiques (lombalgies, tendinites…)
- les troubles DYS dyslexie, dyspraxie, dysphasie)
Handicap psychique : ce que dit la loi
La notion de handicap psychique est inscrite dans la loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées au même titre que le handicap moteur, sensoriel et cognitif. « Constitue un handicap, au sens de la présente loi, toute limitation d’activité ou restriction de participation à la vie en société subie dans son environnement par une personne en raison d’une altération substantielle, durable ou définitive d’une ou plusieurs fonctions physiques, sensorielles, mentales, cognitives ou psychiques, d’un polyhandicap ou d’un trouble de santé invalidant ».
Pour rappel, depuis le 10 juillet 1987, la loi d’obligation d’emploi des travailleurs handicapés impose aux entreprises de 20 salariés et plus, d’employer des personnes handicapées dans la proportion de 6 % de leurs effectifs.
Les actions pour réussir le recrutement d’un travailleur en handicap psychique
Pour répondre à leurs obligations légales, les entreprises ont donc le devoir de compter parmi leurs effectifs des personnes handicapées.
Malgré tout, c’est une population très touchée par le chômage. Selon l’Assurance Maladie, le taux de chômage est deux fois plus important pour cette catégorie et il est aussi plus long (846 jours en moyenne). Si le candidat que vous rencontrez est atteint d’un handicap psychique, voilà quelques conseils pour réussir votre recrutement.
1. Etre inclusif dès l’annonce
Vous le savez déjà, la rédaction de l’offre d’emploi est particulièrement importante. Structurée, descriptive, synthétique, elle vous assure d’attirer les meilleurs candidats. Mais avez-vous pensé à être inclusif ? En effet, si vous souhaitez attirer les profils les plus compétents, n’oubliez pas de communiquer sur l’environnement comme l’adresse du lieu de travail, les horaires, les opportunités de travail à distance, les détails concernant le poste de travail etc.
2. Donner la priorité aux compétences
En tout état de cause, le handicap psychique du candidat ne devrait jamais cannibaliser les compétences de la personne que vous recrutez. Au lieu de commencer par penser aux ajustements à prévoir, focalisez-vous avant tout sur son parcours pour évaluer si elle possède les compétences recherchées pour le poste.
Pendant l’entretien de recrutement, si le candidat mentionne son handicap psychique ou sa RQTH, évoquez d’abord son expérience et ses qualifications avant de lui parler des conséquences éventuelles de son handicap sur sa fonction et des solutions à aménager si nécessaire.
L’agefiph rappelle que :
- Si 80 % des demandeurs d’emploi handicapés ont un niveau de diplôme inférieur au bac+3, elles sont toutefois riches d’une longue expérience (34 % ont 50 ans et plus).
- 93 % des employeurs ayant embauché une personne handicapée se déclarent satisfaits et soulignent sa motivation, son implication et son rôle positif dans les équipes de travail.
3. Se familiariser avec les formes de handicaps psychiques
Le recrutement réussi d’un travailleur handicapé nécessite que le recruteur et le manager direct se renseignent sur la nature du handicap psychique dont il est atteint et les comportements atypiques et intermittents qui y sont attachés. Pour rappel, un handicap psychique peut être lié à certaines pathologies mentales comme :
- les psychoses (comme les troubles schizophréniques)
- les troubles bipolaires
- les troubles anxieux
- la dépression
- les troubles graves de la personnalité (personnalité borderline, par exemple)
- les TOC (troubles obsessionnels compulsifs)
En fonction de la pathologie, le handicap psychique peut se manifester sous diverses formes comme indiquées par l’Unafam :
- Capacité à s’organiser dans une activité habituelle : planifier, organiser, anticiper
- Capacité à s’organiser dans une activité inhabituelle
- Capacités d’apprentissage
- Capacité à se concentrer, à mémoriser
- Capacités d’empathie cognitive : savoir « se mettre à la place de l’autre » et le comprendre
- Capacités d’empathie émotionnelle : se montrer sensible aux émotions d’autrui, se montrer compréhensif et capable de tact et de respect
- Capacités à identifier les rôles sociaux, la signification des situations sociales
- Difficulté à initier une action de base, c’est-à-dire les gestes élémentaires de la vie quotidienne
- Difficulté à anticiper, à entreprendre ou à persévérer
- Difficultés à gérer le temps
- Difficulté à évaluer ses capacités, à reconnaître ses limites et à les prendre en compte
- Difficulté à savoir demander de l’aide en cas de besoin et à coopérer aux soins
4. Se faire accompagner
En tant que recruteur, vous ne pouvez pas agir seul. Face à une situation inédite, rien ne vous empêche d’impliquer d’autres personnes pendant la phase du recrutement et au moment de l’intégration :
- Le futur manager
- Un conseiller Cap emploi ou Pôle emploi
- Un conseiller de l’Agefiph
- Le médecin du travail
- Le responsable RH
- La Maison départementale des personnes handicapées (MDPH)
- Un Intervenant en prévention des risques professionnels (IPRP)
5. Mettre en place des solutions en interne
Si le recrutement prend le chemin de l’embauche, rappelez-vous que le code du Travail indique que l’employeur doit prendre les mesures appropriées pour permettre au salarié handicapé d’exercer un emploi, correspondant à ses qualifications. Après avoir discuté avec le candidat de ses besoins spécifiques, le recruteur peut évaluer avec le manager, les limitations à prendre en compte et les accommodations à envisager :
- Aménager le poste de travail : bureau isolé, lumière adaptée
- Adapter ses horaires : arrivée en décalé, temps partiel
- Alléger certaines missions
- Proposer le télétravail
- Suggérer un accompagnement RH spécifique
6. Eviter la stigmatisation
La maladie psychique et le handicap qui peut en résulter restent malheureusement trop méconnus en France. Cette invalidité psychique véhicule énormément de préjugés négatifs souvent par manque de connaissance. Même si les salariés handicapés restent encore trop minoritaires en entreprise, il est important de rappeler que :
- 8 % d’entre eux sont cadres
- 19 % exercent des professions intermédiaires
Dans le cadre d’un handicap psychique, le recruteur, le manager et les autres salariés doivent comprendre qu’il est possible de minimiser son impact sur le travail du travailleur handicapé s’il est soutenu.
7. Sensibiliser les équipes
Pour que le recrutement soit une réussite, il faut également communiquer avec le manager et les personnes du service pour éviter tout malentendu et développer une cohésion d’équipe. Il peut être utile d’organiser une réunion d’information pour sensibiliser sur le handicap, mettre fin aux clichés, répondre aux questions éventuelles et préparer à certains comportements liés au handicap psychique. Et se rappeler que selon l’Agefiph, 87 % des salariés travaillant avec des collègues handicapés trouvent leur présence enrichissante.
8. Offrir un espace d’expression
Pour compléter l’intégration sereinement, il peut être intéressant de donner au travailleur handicapé l’opportunité de pouvoir s’exprimer en toute confiance sur ses éventuelles difficultés professionnelles. Pourquoi ne pas désigner au sein de l’entreprise, un référent, bienveillant et formé, qui pourra l’écouter, le conseiller et trouver des solutions en collaboration avec le manager ou les ressources humaines ?
9. S’appuyer sur les dispositifs proposés
La reconnaissance légale du handicap permet au salarié de bénéficier de dispositifs prévus pour favoriser son insertion professionnelle. De son côté, l’entreprise peut être accompagnée pour aménager son poste et ses conditions de travail.
- L’emploi accompagné
L’emploi accompagné s’adresse aussi aux salariés en poste et propose un accompagnement personnalisé pour sécuriser leur emploi.
- La prime d’insertion
Cette aide prévoit une subvention forfaitaire pour la signature d’un CDI ou d’un CDD d’une durée minimale de 12 mois.
- Les aides à l’apprentissage et au contrat de professionnalisation
Pour un contrat de 6 mois minimum et 24 heures de travail hebdomadaire. Le montant maximum est de 5000€
- L’aide à l’accueil, à l’intégration et à l’évolution professionnelle
Elle permet de financer tout besoin nécessaire pour optimiser l’intégration et l’évolution du salarié par le biais d’un accompagnement personnalisé (tutorat, coaching etc.). Son montant maximum s’élève à 3150€
- La prime au tutorat
Elle permet de favoriser l’intégration du travailleur handicapé en participant au financement de la mise en place d’un référent au sein de l’entreprise.
- L’aide à l’adaptation aux situations de travail
L’Agefiph peut prendre en charge le surcoût des équipements spécifiques nécessaires au regard du handicap mis à disposition par l’employeur au bénéfice d’une personne handicapée et du collectif dans lequel elle travaille.
Pour aller plus loin dans votre recrutement inclusif
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De Nathalie Dépret