Devenir une entreprise handi accueillante : mode d’emploi
Une entreprise handi-accueillante n’a pas seulement vocation à respecter les réglementations en vigueur sur l’emploi des personnes en situation de handicap. Face à la pénurie de main d’œuvre et aux exigences d’inclusivité réclamées par les salariés, c’est un enjeu qui, désormais, doit absolument être intégré à votre RSE.
Les derniers chiffres publiés par L’Observatoire de l’emploi et du handicap de l’Agefiph laissent entrevoir une amélioration de la situation des actifs handicapés.
Pourtant, même si le taux de chômage des personnes en situation de handicap était de 12% en 2022 – son plus bas niveau depuis 2008 – il reste toujours deux fois plus élevé que les autres actifs. Mais à l’heure où l’entreprise doit assumer un rôle social, l’intégration du handicap reste encore un enjeu majeur pour de nombreux employeurs.
Une entreprise handi-bienveillante, c’est quoi ?
Avant de devenir une entreprise handi-bienveillante, il faut déjà comprendre exactement de quoi il s’agit. S’engager à embaucher et former des salariés en situation de handicap ne peut pas uniquement se limiter à respecter les quotas fixés par l’État.
En réalité, il s’agit de mener une véritable démarche d’incursion professionnelle dans le but d’offrir les mêmes opportunités à tous, de créer un cadre handi-accueillant où chacun est valorisé pour ses réussites.
Cette politique handi-bienveillante inclut donc l’embauche de personnes en situation de handicap physique ou mental, leur maintien dans l’emploi, le déploiement de mesures d’accessibilité etc.
Les bénéfices de devenir une entreprise handi-bienveillante
Pôle emploi indique que 79% des entreprises ont recruté une personne handicapée et 85% se disent prêtes à recommencer. Sans doute parce qu’elles ont saisi les avantages de miser sur le recrutement d’un salarié handicapé.
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Le respect de la réglementation
Depuis la loi du 10 juillet 1987, les entreprises de 20 salariés et plus ont l’obligation de compter un minimum de 6 % de personnes handicapées dans leurs équipes. C’est ce qu’on appelle l’Obligation d’emploi des Travailleurs handicapés (OETH).
En cas de non-respect de cette obligation, les entreprises doivent verser à l’Agefiph, une contribution financière annuelle qui vise à compenser l’absence totale ou partielle de personnes handicapées
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La promotion des valeurs de l’entreprise
Au-delà des quotas, la diversité est un sujet qui contribue à fédérer les équipes. Ainsi, en embauchant des personnes handicapées, l’employeur prouve qu’il appréhende pleinement sa responsabilité sociale.
Ce capital social peut d’ailleurs influencer positivement la perception de l’entreprise auprès de ses salariés. Sans parler de l’impact sur les candidats qui s’intéressent et jugent les actions mises en place par les entreprises en matière de diversité et d’inclusion.
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Un engagement accru des équipes
De par leurs expériences, les entreprises handi-bienveillantes confirment que la présence de personnes handicapées dans une entreprise entraîne des répercussions très positives sur les équipes en place.
En effet, l’embauche de ces salariés très motivés va indirectement booster l’engagement de leurs collègues, diminuer l’absentéisme, développer l’esprit d’équipe, améliorer le climat général et par extension la productivité des équipes.
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Une réponse à la crise des talents
Dans le Guide de survie des recruteurs publié par Monster, les entreprises indiquent que leur préoccupation N°1 est de recruter des candidats de qualité avec les compétences requises.
De ce fait, 92% des recruteurs ont souvent des problèmes à pourvoir des postes vacants en raison de la pénurie de compétences des profils. En élargissant votre sourcing à des candidats en situation de handicap, vous répondez à cette crise et vous prouvez que ces talents, en dépit de leur différence, possèdent des compétences précieuses et trop souvent inexploitées. Face à la pénurie actuelle, pourquoi s’en priver ?
Comment devenir une entreprise handi-accueillante ?
De l’aménagement de poste à la sensibilisation des équipes, il existe de nombreux leviers d’action pour favoriser l’inclusion de salariés en situation de handicap dans l’entreprise.
1. Etablir un diagnostic
Pour mener à bien cette prise en compte du handicap en entreprise, il est important de prendre le recul nécessaire en interne et de réfléchir en profondeur. Quels les besoins de l’entreprise ?
Quels les freins existants à leur inclusion ? Quelles procédures qui maintiennent des préjugés inconscients et comment les remettre en cause ? Le chantier peut sembler pharaonique mais il existe des plateformes pour vous aider à faire le bilan notamment en menant un autodiagnostic en ligne ou en faisant appel à l’Agefiph qui accompagne les entreprises pour créer un plan d’action viable et réaliste.
2. Se faire accompagner
On ne devient pas une entreprise handi-bienveillante du jour au lendemain. Face à une situation inédite, de nombreuses entreprises font appel à des structures spécialisées comme Cap emploi ou les Esat.
Ces structures ont pour objectifs de favoriser l’intégration des travailleurs en situation de handicap, les aider dans les démarches administratives ou encore évaluer le coût des aménagements nécessaires.
3. Associer les salariés
Si vous comptez parmi vos salariés, des personnes en situation de handicap, le service RH peut se tourner vers eux pour recueillir leur avis précieux.
Souvent ignorés, ils seront ravis d’être consultés pour vous éclairer sur les moyens nécessaires auxquels vous n’avez pas forcément pensé, le langage à employer, les codes de conduite à respecter et créer ainsi un environnement plus accueillant.
Si vous n’employez pas encore de salariés handicapés, n’hésitez pas à inclure le Comité social et économique, les représentants du personnel ou les syndicats pour partager votre volonté d’inclusion.
Ecouter leur opinion sur la mise en place d’un environnement sécurisant optimisera l’expérience collaborateur.
4. Intégrer sa démarche à la politique de RSE
Pour pouvoir se définir pleinement comme handi-bienveillante, une entreprise ne va pas « se contenter » d’aborder le sujet en respectant des quotas. Elle va aller plus loin en intégrant la question à sa RSE et à sa stratégie de ressources humaines.
Pour cela, certaines entreprises ont créé une Mission handicap qui permet ainsi d’implémenter sérieusement l’OETH. Pour les entreprises d’au moins 250 salariés, le référent handicap va mettre en place des procédures pour améliorer la représentation des salariés en situation de handicap et les accompagner dans leur quotidien professionnel.
Si vous le souhaitez, vous pouvez formaliser l’engagement de l’entreprise envers vos salariés handicapés en concluant un accord avec les partenaires sociaux ou par le biais d’une convention avec l’Agefiph.
5. S’appuyer sur les dispositifs existants
Pour vous aider à naviguer dans ces eaux inconnues, vous pouvez également vous appuyer sur des mesures visant à aider les employeurs.
Comme l’emploi accompagné qui désigne un « référent emploi accompagné » dont la mission est d’évaluer, d’adapter le poste et l’environnement de travail, prévenir ou encore remédier aux difficultés rencontrées.
Vous pouvez également disposer de l’aide l’accueil, l’intégration et l’évolution professionnelle des personnes en situation de handicap en entreprise. Comme son nom l’indique, ce dispositif vise à faciliter le quotidien des salariés handicapés en finançant leur accompagnement à hauteur de 3000€.
Il existe également des aides de l’Agefiph pour les entreprises de moins de 20 salariés qui souhaitent recruter des personnes handicapées.
6. Nommer un référent
Pour les entreprises qui comptent parmi leurs équipes, des salariés handicapés, pourquoi ne pas demander à l’un d’entre eux de devenir leur interlocuteur de référence ?
C’est un rôle crucial qui peut faciliter le dialogue et encourager certains salariés isolés à partager leurs difficultés sans se sentir jugé. Nommer un référent permet une valorisation bienvenue et une visibilité inspirante pour les autres salariés handicapés.
7. Sensibiliser, sensibiliser, sensibiliser
Du service RH aux managers en passant les salariés, il est impératif de miser sur la formation si vous souhaitez être une entreprise handi-accueillante.
Pour créer un environnement respectueux, il faut avant tout commencer par déconstruire un certain nombre d’idées reçues sur le handicap à l’aide de formations, de conférences, de guides pratiques ou de programmes de sensibilisation.
A travers des échanges, cette sensibilisation permet en effet d’identifier des préjugés inconscients, briser les tabous, éviter les généralisations, questionner la perception médicale (qui voudrait que les personnes handicapées ne soient performantes) ou encore réaliser que 80% des handicaps ne sont pas forcément visibles comme le Trouble du spectre de l’autisme, (TSA), la dépression, le syndrome post traumatique etc.
Au final, ces formations et ces discussions permettent à l’ensemble des équipes de mieux comprendre les challenges de leurs collègues handicapés et de les armer d’outils pour trouver des solutions à des problèmes professionnels.
8. Elargir les canaux de recrutement
Pour mener à bien cette politique d’inclusion, il ne faut pas hésiter à diversifier les jobboards que vous utilisez lors de vos recherches de candidats.
Pour atteindre un public plus divers et accéder à des profils qui répondent à vos besoins, vous pouvez faire circuler vos offres d’emploi sur des plateformes spécialisées comme l’Agefiph, Job in Live ou encore Cap emploi ou encore participer à des forums de recrutement comme HandiCafé.
9. Se focaliser sur les compétences des candidats
Une entreprise handi-accueillante comprend que les compétences priment sur le handicap et que ce serait un gâchis de les ignorer sous prétexte que le candidat dispose d’une RQTH. Votre entreprise recherche des candidats qualifiés ?
Comme tout autre talent, il faut l’évaluer et l’interroger sur ses compétences techniques et humaines, son potentiel, sa motivation etc. C’est le meilleur moyen de trouver la personne la plus adaptée au poste qu’il s’agisse d’un salarié, un stagiaire ou un alternant.
10. Adapter les conditions de travail
Bien évidemment, une entreprise handi-accueillante a l’obligation de procéder aux aménagements nécessaires ou à une organisation particulière pour faciliter l’intégration et le travail de ses salariés handicapés.
Il peut s’agir d’horaires flexibles, de missions sur-mesure, de fournir des outils, du matériel ou un service adapté comme le télétravail, un ordinateur avec un logiciel spécialisé, une chaise adaptée, un parking accessible, un accompagnement humain, des rampes d’accès etc. Une excellente façon de soigner son intégration dans l’entreprise et de lui assurer un quotidien serein.
11. Assurer l’évolution professionnelle
Embaucher un salarié handicapé, c’est aussi pérenniser son emploi. Pour cela, l’employeur peut notamment s’appuyer sur la gestion prévisionnelle des emplois et des carrières (GPEC), un outil RH qui permet de manager les effectifs et les besoins en compétences de l’entreprise.
Il est aussi indispensable de proposer à ce salarié de participer à des programmes de formation pour assurer sa montée en compétences et de s’appuyer sur des dispositifs comme l’Aide à la formation des salariés handicapés dans le cadre d’un maintien de l’employabilité.
10 exemples actions handi-accueillantes
- Chez Accenture, on propose au salarié l’utilisation de HandiReality, un outil d’immersion en réalité virtuelle qui permet d’appréhender le quotidien d’une personne handicapée. L’entreprise réalise également des guides pratiques pour découvrir les différentes familles de handicap.
- Sopria Steria délivre une bourse pour accompagner lycéens et étudiants handicapés dans la poursuite d’études dans le supérieur. Elle sponsorise également des équipages handi-valides pour le Challenge Handi’Voile
- La Mission handicap de la Banque de France fait appel à des prestataires externes comme des psychologues ou des ergonomes pour le bien-être de ces salariés. Elle finance également les moyens de transport adapté.
- Chez Assystem, les salariés en situation de handicap ont droit à des jours d’absence supplémentaires pour des raisons médicales et/ou administratives.
- Le Groupe Elsan a mis en place un réseau « de référents Handicap » qui sont en charge de l’information et de l’accompagnement des collaborateurs, au sein de chaque site.
- Devoteam a créé le Handi’Tour : chaque année, l’entreprise entreprend une campagne de sensibilisation auprès de ses salariés. Les membres de la Mission Handicap et les référents handicap vont à la rencontre des salariés pour échanger avec eux.
- CDiscount a mis en place des solutions de compensation à la dyslexie avec un logiciel de correction orthographique, accompagnement du manager, sensibilisation auprès des collègues etc. Un interprète en langue des signes est présent pour les salariés sourds et malentendants lors du point annuel avec le PDG.
- La Mission Handicap de Fiducial a élaboré un guide des bonnes pratiques pour sensibiliser les recruteurs sur le handicap et la discrimination durant tout le processus de recrutement et pour se préparer aux entretiens d’embauche.
- CGI pilote l’aide aux enfants et conjoints en situation de handicap des salariés : aménagement du temps de travail, acquisition de matériel adapté, accompagnement dans les démarches de type éducatif pour les enfants et les adultes.
- Dekra organise des ateliers d’initiations pour sensibiliser ses équipes. Cela va de la langue des signes à des démonstrations de chiens d’assistance.
Engagez-vous pour l’inclusivité
Pour vous accompagner dans cette démarche, Monster a imaginé un livre blanc gratuit Handicap au travail : guide pour recruter et intégrer les collaborateurs en situation de handicap. C’est un outil précieux pour faire le point sur les obligations légales de l’entreprise, rappeler les bénéfices pour la marque employeur avant de vous embarquer dans une véritable stratégie de recrutement inclusive.
De Nathalie Dépret