Travailler en France après le Brexit : le point sur le titre de séjour et le permis de travail

Travailler en France après le Brexit : le point sur le titre de séjour et le permis de travail

La Grande Bretagne n’est plus membre de la communauté européenne. Depuis le Brexit, les ressortissants Britanniques ne sont donc plus en mesure de travailler en France (comme dans le reste de l’Europe) aussi simplement qu’avant. Voici les nouveautés en matière de droit au séjour et de permis de travail pour les salariés Anglais depuis la promulgation de la Loi Immigration 2024.

Recruter un ressortissant Britannique post-Brexit

Votre entreprise emploie des salariés Anglais ? Vous faites passer des entretiens et un candidat, ressortissant Britannique, vous a tapé dans l’œil ? Quelle que soit votre situation, vous vous demandez surement comment cette décision impacte votre entreprise.

L’entrée en application du Brexit a eu pour effet de rendre obligatoire, pour les ressortissants Britanniques, comme pour tout autre citoyen non européen, la possession d’un visa et d’un titre de séjour les autorisant à travailler dans un pays membre de l’Union Européenne.

Quid des ressortissants britanniques installés en France avant le 1er janvier 2021 ?

Les ressortissants britanniques et les membres de leur famille qui résidaient déjà en France avant le 1er janvier 2021 ont vu leur droit au séjour et d’accès au travail maintenu en application de l’accord de retrait. La possession d’un titre de séjour est devenue obligatoire depuis le 1er octobre 2021 pour toute personne âgée de plus de 18 ans, quelle que soit leur date d’arrivée dans le pays. Grâce à l’accord de retrait, ils n’ont toutefois pas besoin de demander une autorisation de travail pour continuer à travailler en France. Rappelons que les ressortissants britanniques et les membres de leur famille arrivés en France après 2021 ne sont pas bénéficiaires de l’accord de retrait.

Quel visa pour travailler en France ?

Pour les Britanniques qui souhaitent venir travailler en France, les démarches ont encore une fois évolué avec la loi « pour contrôler l’immigration, améliorer l’intégration » du 26 janvier 2024. Le texte veut renforcer l’intégration des étrangers en France, par le travail, la langue et le respect des principes de la République. Comment cela se traduit lors du recrutement d’un salarié anglais ?

Les citoyens britanniques doivent désormais également demander une autorisation de travail selon leur date d’arrivée en France et leur situation. Les conditions d’obtention de visa ne sont toutefois pas les mêmes selon la durée du séjour (et la profession).

Depuis la sortie définitive du Royaume-Uni de l’Union européenne en 2021, les Britanniques sont contraints de respecter une limite de 90 jours par laps de six mois pour leurs séjours sans visa sur le continent.

Travailler en France moins de 3 mois

Pour tout séjour de moins de 3 mois, les travailleurs Britanniques, ou ressortissants d’un état non-membre de l’UE, n’ont pas besoin de visa. Ils devront, toutefois, obtenir une autorisation de travail. C’est à vous, en tant qu’employeur d’en faire la demande sur le portail de la Direction générale des étrangers en France, 3 mois avant l’arrivée du salarié Anglais.

Travailler plus de 3 mois en France

Depuis le Brexit, les ressortissants Britanniques venant travailler en France plus de 3 mois doivent, avant leur arrivée, faire une demande de titre de séjour, comme tout autre citoyen non européen, sur le site officiel France Visa.

A son arrivée en France, le salarié étranger devra valider en ligne ou faire sa demande de carte de séjour à la préfecture de son département. A noter toutefois que le visa lui permet de travailler sans attendre l’obtention du titre de séjour.

Les métiers pour lesquels l’autorisation de travail n’est pas exigée

Certaines professions et missions sont dispensées de permis de travail. Cela concerne les activités salariées pour une durée inférieure ou égale à 3 mois et les citoyens étrangers, et dans ce cas les Britanniques, venant en France.

  • Les manifestations sportives, culturelles, artistiques et scientifiques ;
  • Les colloques, séminaires et salons professionnels ;
  • La production et la diffusion cinématographiques, audiovisuelles, du spectacle et de l’édition phonographique, les artistes du spectacle et le personnel technique attaché à la production ou à la réalisation ;
  • Le mannequinat et la pose artistique ;
  • Les services à la personne et les employés de maison pendant le séjour en France de leurs employeurs particuliers ;
  • Les missions d’audit et d’expertise en informatique, gestion, finance, assurance, architecture et ingénierie, lorsqu’il est détaché en application des dispositions de l’article 1262-1 du code du travail;
  • Les activités d’enseignement dispensées, à titre occasionnel, par des professeurs invités.

· Les profils qui sont dispensés d’autorisation de travail

Certains salariés anglais et étrangers peuvent être dispensés de permis de travail en fonction de leur statut ou de la durée de leur mission. Leur titre de séjour doit alors mentionner expressément que le travailleur étranger est autorisé à travailler en France.

Voici les titres de séjours concernés par cette exemption :

  • VLS-TS ou carte de séjour « vie privée et familiale » ou carte de séjour temporaire « vie privée et familiale » en tant que membre de la famille d’un français ou résident de longue durée-UE ;
  • Carte de séjour pluriannuelle « passeport talent » ou « passeport talent (famille) » ;
  • Carte de séjour « salarié détaché ICT » ou « salarié détaché ICT (famille) » ;
  • VLS-TS ou carte de séjour « étudiant » ou « étudiant programme de mobilité ». Elle permet d’exercer dans la limite de 60 % de la durée annuelle du travail (ou 964 heures). Au-delà, il faudra demander une autorisation provisoire de travail (APT) avant le début l’activité ;
  • Visa vacances-travail, etc.

Avec la nouvelle loi immigration 2024, on peut désormais ajouter à cette longue liste, les métiers dits « en tension » (BTP, restauration, aide à la personne, entretien …). La liste exhaustive des métiers en tension est mise à jour tous les ans.

Recrutez un Britannique dans votre entreprise

Vous employez déjà des salariés britanniques ?

Vous êtes une entreprise française qui emploie des ressortissants Britanniques et leurs contrats ont été signés avant le 1er janvier 2021 ? Votre situation ne change pas. Pensez toutefois à vous assurer que le salarié Anglais a bien effectué les démarches pour obtenir un titre de séjour, obligatoire depuis le 1er octobre 2021, afin de rester dans la légalité en France.

Vous voulez recruter un salarié britannique ?

Les démarches pour recruter un Anglais sont désormais similaires à celles pour recruter un travailleur étranger. Si le ressortissant Britannique habite déjà en France, vous devez vérifier qu’il est bien en possession d’une autorisation de travail ou d’un titre de séjour mentionnant expressément qu’il est autorisé à travailler en France. Si ce dernier ne comporte pas d’autorisation de travail, il reviendra au ressortissant Britannique de procéder au changement de statut.

Vous recrutez sur un métier en tension ?

En matière d’emploi, la loi immigration 2024 crée un nouveau titre de séjour pour les salariés britanniques des métiers en tension. Il est désormais possible de régulariser, à titre exceptionnel et temporairement, des travailleurs étrangers (non ressortissants des États membres de l’Union européenne, de l’Espace économique européen ou de la Confédération suisse) exerçant dans des métiers rencontrant de fortes difficultés de recrutement, aussi appelés métiers en tension. Il est renouvelable, à condition, bien sûr, de rester dans un métier en tension.

Cette nouvelle procédure de régularisation n’implique plus aucune participation de l’employeur. En effet, jusqu’à présent, toute procédure de régularisation d’un travailleur étranger impliquait directement l’employeur qui effectuait lui-même la demande d’autorisation de travail.

Cette obligation de régularisation de statut revient désormais au travailleur qui n’est plus obligé de passer par l’employeur pour solliciter sa carte de séjour temporaire.

Pour se voir délivrer une carte de séjour « travailleur temporaire » ou « salarié » d’une durée d’un an, le travailleur anglais doit remplir les conditions suivantes :

  • Avoir exercé une activité salariée figurant dans la liste des métiers en tension durant au moins 12 mois, consécutifs ou non, au cours des 24 derniers mois ;
  • Occuper un emploi « en tension » au moment de la demande ;
  • Justifier d’une période de résidence ininterrompue d’au moins 3 ans en France.

Attention, les préfets conservent toutefois un pouvoir discrétionnaire pour accorder, ou non, le titre de séjour.

Très attendue par nombre de professionnels du BTP et du secteur social et médico-social pour remédier aux difficultés de recrutement, cette disposition sera expérimentée sur le territoire jusqu’au 31 décembre 2026.

Comment vous protéger lorsque vous recrutez un salarié anglais ?

Votre responsabilité lorsque vous recrutez un Britannique post-Brexit

Embaucher un travailleur étranger sans procéder aux vérifications nécessaires, quant à son autorisation de travail, vous fait encourir de lourdes sanctions pénales, pécuniaires et administratives. En effet, selon l’article L. 8251-1 du code du travail, nul ne peut, directement ou par personne interposée, engager, conserver à son service ou employer pour quelque durée que ce soit un étranger non muni du titre l’autorisant à exercer une activité salariée en France.

Vous devez donc contrôler son authenticité auprès de la préfecture du département du lieu d’embauche ou du préfet de police à Paris. Sauf s’il est inscrit sur la liste des demandeurs d’emploi de Pôle emploi. Cette démarche doit être effectuée au moins 2 jours ouvrables avant la date d’effet de l’embauche. Sans réponse dans les 2 jours suivant la réception de la demande, votre obligation de vérification est considérée comme remplie.

Après vérification du titre de séjour et de l’autorisation de travail, vous pourrez procéder aux formalités d’embauche habituelles.

L’amende administrative pour les employeurs en cas d’absence de titre de travail

Votre responsabilité ne s’arrête pas là. En effet, la loi immigration 2024 inaugure aussi une amende administrative en remplacement de la contribution spéciale et de la contribution forfaitaire versées à l’Office français de l’immigration et de l’intégration (OFII). Cette amende s’applique dans les situations suivantes :

  • Emploi ou conservation d’un travailleur étranger sans titre de travail autorisant l’exercice d’une activité salariée en France,
  • Emploi ou conservation à son service d’un travailleur étranger dans une catégorie professionnelle, une profession ou une zone géographique autres que celles mentionnées sur son titre de travail,
  • Recours aux services d’un travailleur étranger non autorisé à travailler.

L’amende administrative est plafonnée à 20 750 euros par travailleur étranger et peut être majorée en cas de récidive, atteignant alors 62 250 euros au maximum. Le ministre chargé de l’immigration détermine le montant en prenant en considération :

  • Les capacités financières de l’auteur de l’infraction.
  • Le degré d’intentionnalité.
  • Le degré de gravité de la négligence.
  • Les frais d’éloignement du territoire français du ressortissant étranger en situation irrégulière.

Augmentation de l’amende pénale

Une évolution significative est à noter : l’amende pénale encourue par un employeur qui embauche ou conserve un travailleur étranger passe désormais à 30 000 euros par travailleur étranger, comparé à son ancien montant de 15 000 euros. En cas d’infraction commise en bande organisée, cette amende s’élève à 200 000 euros, contre 100 000 euros auparavant.

De surcroît, la portée de cette amende pénale a été élargie pour inclure les situations où l’employeur engage ou conserve à son service un travailleur étranger dans une catégorie professionnelle, une profession ou une zone géographique autres que celles mentionnées dans son titre de séjour.

Nécessité d’un titre de séjour pour exercer en tant qu’entrepreneur individuel

Depuis l’entrée en vigueur de la loi du 26 janvier 2024, les étrangers non ressortissants de l’Union européenne, ressortissants britanniques venant en France inclus, doivent être titulaires d’un titre de séjour pour exercer sous le statut d’entrepreneur individuel.

Cette nouvelle disposition vise à assujettir les entrepreneurs individuels exerçant une profession libérale à l’obligation de détenir un titre de séjour, une exigence qui n’existait pas auparavant.

Pour aller plus loin

Pour vous accompagner dans vos démarches ou pour toute question sur votre stratégie de recrutement, consultez nos nombreux livres blancs sur le sujet, comme notre guide pour mieux recruter en préparant sa stratégie de recrutement.

De Carla Cino